Luigi Bellocchio (Equipe Marsicano) et al. in eLife
Le cannabis est la drogue illicite dont l'abus est le plus répandu aux États-Unis et dans le monde. En outre, de nombreux États des États-Unis, ainsi que plusieurs pays dans le monde, ont légalisé l'usage médical et/ou récréatif du cannabis. Dans ce paysage de la consommation de cannabis en pleine expansion, d'énormes efforts sont déployés pour trouver des interventions innovantes permettant de réduire les méfaits potentiels du cannabis. Ici, nous avons étudié la relation possible entre les cannabinoïdes et l'autophagie, le processus d'"autodigestion" cellulaire programmée, et nous avons demandé si elle pouvait être liée au contrôle du comportement de coordination motrice, l'un des processus neurobiologiques les mieux établis sur lequel les cannabinoïdes ont un impact.
Nous avons montré que le Δ9-tétrahydrocannabinol, le principal ingrédient psychoactif du cannabis, altère l'autophagie et accumule la protéine P62 dans les neurones du striatum, une zone du cerveau qui joue un rôle clé dans le contrôle de la coordination motrice. Deuxièmement, nous démontrons que le renforcement de l'autophagie, soit par manipulation pharmacologique (avec la cible mammifère de l'inhibiteur de la rapamycine temsirolimus approuvé par la FDA) soit par intervention alimentaire (avec le tréhalose, un disaccharide naturel et non toxique), permet de sauver la déficience de l'autophagie striatale et de la coordination motrice chez la souris induite par le Δ9-tetrahydrocannabinol. En outre, nous apportons la preuve que les récepteurs cannabinoïdes CB1 situés sur les neurones de la voie striatale directe (stratonaire), en se couplant à la cible mammifère de l'activation de la rapamycine et de l'inhibition de l'autophagie, sont indispensables à l'activité de dyscoordination motrice du Δ9-tétrahydrocannabinol chez la souris.
Enfin, grâce à la manipulation génétique à médiation virale des neurones striatonigres, nous avons confirmé que la perturbation de la cible mammifère de la voie de la rapamycine, ainsi que l'augmentation de l'accumulation de P62 dans ces cellules, empêche complètement l'altération de l'autophagie striatale et de la dyscoordination motrice induite par le Δ9-tétrahydrocannabinol chez les souris.
Pris ensemble, ces résultats identifient l'altération de l'autophagie comme un lien mécaniste sans précédent entre les cannabinoïdes et la dyscoordination motrice, et suggèrent que les activateurs de l'autophagie pourraient être considérés comme des outils thérapeutiques prometteurs pour traiter certaines altérations comportementales provoquées par les cannabinoïdes.
Article
Inhibition of striatonigral autophagy as a link between cannabinoid intoxication and impairment of motor coordination. Cristina Blázquez, Andrea Ruiz-Calvo, Raquel Bajo-Grañeras, Jérôme M Baufreton, Eva Resel, Marjorie Varilh, Antonio C Pagano Zottola, Yamuna Mariani, Astrid Cannich, José A Rodríguez-Navarro, Giovanni Marsicano, Ismael Galve-Roperh, Luigi Bellocchio, Manuel Guzmán ; eLife 2020;9:e56811 doi: 10.7554/eLife.56811
https://elifesciences.org/articles/56811